mardi 29 décembre 2015

Annexe 11 - Patagonie - Les Kawesqars - Disparition d'humains du mode de production humain

Kawésqar

Géographie

- multitude d'îles et d'îlots délimitant un labyrinthe de chenaux et de fjords dangereux pour la navigation.
- Il n'y a pratiquement pas de plaines côtières et les plages.
- Les côtes abruptes des îles et des îlots sont, là où elles sont abritées des vents dominants, sont recouvertes par une forêt vierge dite magellanique, au-dessus du niveau des hautes marées jusqu'à 300 à 400 mètres de haut. Au-dessus s'étend la zone des marécages, tourbières et lichens. Puis viennent les roches nues, suivies des glaciers et des neiges éternelles.
- Les sommets de la Cordillère des Andes culminent là : Fitz-Roy 3 375 mètres, Murallón 3 600 mètres, Bertrand 3 270 mètres, Stokes 3 280 mètres (ou cerro Mayo5), Cordillère Darwin avec le Mont Sarmiento 2 300 mètres. En face de ces murailles de rocs, l'océan Pacifique, muraille liquide de vagues énormes et de tempêtes furieuses.

Climat

- Les vents y sont d'une violence rarement constatée en d'autres parties du monde,
les pluies y sont presque quotidiennes,
- la température moyenne varie de 0 à °C pendant la saison froide (hiver austral) et de 5 à 10 °C pendant la saison chaude (été austral).

Faune

- La faune marine est fort riche en : coquillages (moules (ou Cholgas), oursins) et poissons, oiseaux innombrables (manchots, canards et oies sauvages, mouettes, pétrels et goélands), mammifères marins (baleines et de phoques) qui ont, pendant des millénaires, fourni aux pêcheurs des archipels à la fois leur alimentation de base et une partie importante de la matière première de leur équipement (os, coquilles, cuir, fourrures).

- La faune de la forêt est très pauvre. Elle comporte quelques cervidés (huémuls) dans les grandes îles et sur le continent avec quelques carnassiers (pumas) et seulement, sur le continent, des camélidés sur les côtes de la Terre de Feu et de l'île Navarino. Il subsiste des ragondins et des loutres à l'embouchure des rivières.

Flore

- À 2 à 3 mètres au-dessus du niveau des marées, la forêt magellanique est un entrelacs d'arbres rabougris et pourrissants. Les quelques grands arbres (coïgue) sont assaillis par des lianes immenses, des lichens et des mousses. C'est un milieu hostile à l'homme, les expéditions à venir, après Magellan, en feront la triste expérience.
La flore marine est caractérisée par de grandes algues brunes ou (Wiro) qui balisent les côtes dangereuses et signalent le sens et l'intensité des courants.

Origine



- Il y a deux hypothèses au sujet de leur arrivée dans leur habitat de peuplement.

La première dit qu'ils arrivèrent du nord en suivant la voie des chenaux chilotes, qu'ils franchirent vers le sud, traversant l'isthme d'Ofqui.

L'autre dit qu'ils peuplèrent les îles du détroit de Magellan et qu'ils montèrent par les canaux de la Patagonie jusqu'au golfe de Penas.

- La raison de cette focalisation est l'obtention du feu : les Kawesquars en avaient besoin pour se chauffer. Au fil des siècles, ils découvrirent ces deux points où se trouvaient des gisements de pyrite de fer, minéral dont ils tiraient des étincelles qui enflammaient leurs combustibles.

Histoire

- Les récits sont soigneusement compilés, analysés et recoupés à Nuremberg par le géographe allemand Martin Behaim (1459 - 1507).
- Fernand de Magellan, commandant cinq navires espagnols, arrive dans l'hiver austral 1520. Il hivernera à Puerto San Julián, sur la côte de Patagonie. Il pénètrera dans le détroit éponyme et croisera, dans le second goulet, un canot. L'amiral fera tirer au canon sur des indigènes qui lui font des gestes hostiles sur le rivage, tirent des flèches qui ne portent pas.
- Pedro Sarmiento de Gamboa, en installe la « Colonia del nombre de Jesús » au Cap Virgenes puis un nouveau camp plus sûr, la « Ciudad del Rey Don Felipe », situé plus à l'ouest dans le détroit au sud de l'actuelle ville Punta Arenas, la Ciudad del Rey Don Felipe, plus à l'ouest dans le détroit au sud de l'actuelle ville Punta Arenas. Ces colonies ne purent survivre à la rigueur du climat et à la malnutrition.
- Le site fut attaqué et pillé par les Kawesquars qui subirent des tirs divers ordonnés par le capitaine général Andrés de Viedma.
Les kaweskars vont piller le site après la mort du dernier survivant, se livrant au saccage et au dépeçage des corps, allant jusqu'à s'en prendre aux corps mal enterrés du cimetière et au corps d'une femme pendue au gibet. Ils font éclater les têtes à coups de cailloux et éventrent la femme pendue. Ils vont piller tous les objets en fer (haches, couteaux, épées... qu'ils trouvent. Puis ils marquent l'endroit comme tabou mais sont surpris par une arrivée inopinée avant de quitter les lieux.
- En 1586, le navigateur et corsaire anglais Thomas Cavendish découvrit trois survivants dans les restes du fort de la 2e colonie qu'il renomma Puerto del Hambre. Il se livrera, avec ses marins, à une chasse à l'homme sur les kaweskars.
- Au XVIe siècle, quand s'établirent les premiers contacts avec l'homme blanc, la population était estimée à 3 000 personnes.
 - Dès les premiers contacts, les Européens considérèrent les indigènes de Patagonie comme ses sauvages dignes d'être étudiés. Ils apparaissent repoussants de saleté, enduits de graisse de phoque, sentant horriblement mauvais, d'apparence presque simiesque.
- L'amiral hollandais Jacob l'Hermite, en 1624, faisait canonner les Kaweskars pour « distraire ses brutes bataves ».
- Le capitaine corsaire hollandais de Weert est cité comme ayant fait enlever « une toute jeune fille, une enfant » qui fut ramenée à Amsterdam et vendue à une tenancière de maison close.
- À la fin du XVIIIe siècle, la zone commença à être fréquentée par une grande quantité de navires baleiniers et de chasseurs de phoques, particulièrement de nationalité britannique et nord-américaine. À partir de cette époque, ils commencèrent à contracter des maladies qui les conduiront à leur déclin numérique.
- Entre 1764 et 1766, Sir John Byron, commodore britannique d'une flottille océanographique comprenant le HMS Dolphin (capitaine Lovecraft) et la corvette HMS Tamar (capitaine Wallis), fait escale face aux îles Charles III. C'est un rescapé du naufrage, en 1741, du HMS Wager (capitaine Cheap). Il avait survécu en étant « adopté » par un clan, ce qui lui avait sauvé la vie. Il relata son aventure dans un livre qui connut un grand succès. Il décrit la vie du clan dans le tchelo. Son retour à l'île Charles III lui permet un contact assez amical des indigènes qui seront reçus à son bord.
- En 1768, Bougainville relâche dans la baie Fortescue face aux îles Charles III, avec son navire La Boudeuse .
- Lors du second voyage du HMS Beagle, du au , second voyage d'exploration scientifique du HMS Beagle, commandé par le capitaine Robert FitzRoy, la Patagonian Missionary Society tente le retour d'une jeune femme et d'un homme enlevés (ramenés en Angleterre le ). FitzRoy est accompagné de Charles Darwin. Il doit installer un pasteur, le révérend Wilfrid Watkins, deux catéchistes et les deux fuégiens. Il fait construire une mission, dans une baie de l'Île Dawson, face au cap Anxieux , à l'entrée du chenal Magdalena. Le Beagle part poursuivre sa mission d'exploration dans les îles Il reviendra trois mois après. La mission a été pillée et abandonnée. Le révérend Watkins sera retrouvé mort, assassiné dans les ruines de sa chapelle. Il sera inhumé là.
- Les maladies apportées par les équipages, explorateurs, missionnaires et autres voyageurs, ainsi que les éleveurs de bestiaux de la Terre de Feu arrivés à la fin du XIXe siècle ont tué une grande partie des Alakaluf.
- À compter de 1871 commença l'exhibition d'indigènes vivants dans des ville d'Europe et nord-américaines, dans des Zoos humains. Cette pratique cessa au commencement du XXe siècle. Des familles entières appartenant aux ethnies kaweskar, yagan, selknam et mapuche furent ainsi exhibées en France, Angleterre, Belgique et Allemagne. Elles arrivaient sur commande de sociétés scientifiques et pour des commerçants qui rentabilisaient leur venue avec des exhibitions publiques. Les voyages duraient entre 4 et 6 mois pendant lesquels les malheureux tombaient malades et mouraient.
- En 1881, onze Kaweskars ont été déportés de Patagonie par des européens pour être emmenés à Paris au Bois de Boulogne et au Jardin zoologique de Berlin. Seuls quatre d'entre eux ont survécu à ce voyage et sont retournés au Chili. Les restes des cinq autres ont été rapatriés de l'Université de Zurich (Suisse), au début de 2010. À propos de cet incident, le président chilien s'est excusé au nom de l'État pour avoir laissé ces personnes être déportées et traitées comme des animaux.
- En 1900, la population était estimée à 1 000 kaweskars, chiffre réduit à 250 en 1924.
- À la fin du XIXe siècle, en 1895, des missionnaires salésiens sont envoyés par Mgr Fagnano, préfet apostolique de Patagonie. Ils obtinrent la concession de l'île Dawson (Baie Harriss) où ils établirent une mission dans le but d'évangéliser, « protéger et soigner » les indigènes de cette zone. Avec eux commença le processus de transformation de la vie nomade vers la sédentarisation. Il se fit un changement dans les vêtements, abandonnant l'utilisation de l'huile de loup de mer et la cape de Phoque qui les protégeait de la pluie et du froid. Le vêtement occidental restait humide en permanence, amenant des maladies nouvelles.
- En 1937, le Gouvernement du Chili, par sa Force aérienne établit une station à Puerto Edén. Le premier chef de station, le sergent Carlos Gaymer Gómez, arriva accompagné de son épouse et de sa belle-mère. Ils demeurèrent là jusqu'en avril 1950 de manière continue. Cette famille se dévoua pour éduquer et former les kaweskars qui vinrent vivre autour du poste. Elle adopta deux enfants. Le dernier partit vivre aux États-Unis d'Amérique, à New York.
 - Dans les années 1930, les Alakalufs se sont sédentarisés sur l'île Wellington, dans la ville de Puerto Edén.
- À la fin de l'année 1940, le gouvernement autorisa un jeune kaweskar de 10 ans, distingué par sa vivacité et son intelligence, à partir, avec l'autorisation de ses parents, à Punta Arenas, étudier sous la tutelle des religieux Salésiens. Le Président de la république chilienne lui accorda son parrainage. Il termina ses humanités à Santiago et entra à l'École des Spécialistes des Forces aériennes. Il se maria en 1948 avec une infirmière. Il revint à Port Edén seul, avec le grade caporal de 2e classe. Il règne en tyran sur ses compatriotes qui l'acceptent puis déserte au bout de quelques mois. Il finira en 1953 dans le naufrage de son canot. À la même époque, les Kaweskars fréquentaient la zone des phoquiers chilotes, lesquels, en de nombreuses occasions, commirent des assassinats, des viols et des rapts de Kaweskars.
- En 1992, il n'y avait plus que 60 indigènes vivant à Punta Arenas et la majeure partie à Port Eden.
- Le recensement chilien de 2002 a révélé que 2622 personnes s'auto-identifient comme Kawésqar (ceux pratiquant encore leur culture d'origine ou parlant leur langue maternelle).
 - En 2006, seulement 15 personnes étaient encore de pure souche. Bien que des cours de Kaweskar fassent partie du programme d'études local, il demeure très peu de locuteurs.

Organisation sociale

- L'unité de base est la famille, laquelle se déplace seule dans son canot, à la recherche de sa nourriture. Occasionnellement, les familles se regroupent par deux ou trois pour une tâche spécifique. Ces rencontres sont l'occasion d'échanger des femmes.
- Quand ils sont à terre, les kaweskars construisaient une hutte assez confortable avec des armatures en bois de chêne ou de canelo recouvertes de peaux de phoques ou de nutria ( ragondin).
- Le canot était la pièce la plus importante et appréciée du patrimoine culturel des kaweskars. Il était fabriqué en écorces, de préférence de coïgue. La longueur variait de 8 à 9 mètres. Il pouvait transporter une famille et servir de véritable demeure flottante car il servait pendant une bonne partie de l'année. Ce peuple a maîtrisé l'art de construire des canots avec un outillage datant de l'âge de la pierre Au XXe siècle, sous l'influence des chasseurs chilotes, les kaweskars commencèrent à les construire à partir d'un unique tronc d'arbre évidé, semblables au bongos26 de l'île de Chiloé.
- On peut parler de technologie à propos de ce peuple. Il a maîtrisé le travail de la pierre, du bois, de l'os et des tendons de baleine, des coquilles de mollusques (moules géantes ou cholgas) ainsi que des peaux de loutres et de phoques. Avec ces matériaux, il a confectionné des flèches, des arcs, des frondes, des harpons et des couteaux. Avec des fibres végétales, ils fabriquaient des paniers et des corbeilles. .
- La connaissance du métal a été apportée par les contacts avec les hommes blancs.

- Croyances: Mwono est un esprit du mal et du bruit rôdant dans les montagnes et les glaciers. Il se déplace avec fracas et bouleverse tout sur son passage. Ayayema est un esprit du mal, mauvais et puissant, persécuteur obstiné. Kawtcho est un géant qui chemine sous terre durant le jour, réapparaissant le nuit et traînant une odeur de pourriture. Alel-Cesislaber (ou Arka kercis) est un esprit bon auquel ils rendaient grâce quand un naufrage leur apportait de la nourriture et des outils en fer ou quand ils découvraient une baleine échouée, morte sur une plage.

- Ils chassent les albatros, les phoques, les dauphins. Ils tuent aussi les nouveaux-nés d'otaries, ramassent des œufs de manchots, de sternes et de mouettes. Les femmes plongent pour ramasser les moules géantes (Aulacomya atra ou « cholgas » ou Moules de Magellan). Ils exploitaient les cadavres de cétacés échoués, se groupant à plusieurs clans familiaux. Cette exploitation de viande échouée était aussi le fait d'autres tribus comme les Onas (ou Selk'nam).
- les Kaweskars n'ont jamais cultivé la terre. Ce sont des cueilleurs-chasseurs.

Population


- La population totale n'a jamais dépassé les 5 000 individus.

Tribus et langues

Adwipliin, Aksánas, Alacaluf, Cálen, Caucahue, Enoo, Lecheyel, Taíjataf, Yequinahuere (Yequinahue). D'autres « peuples » ont habité la même région comme les Chono, Yamana, Selk'nam ou les Haus qui se seraient battus pour la possession de ces terres.

Présence occasionnelle en Argentine

Les kawésqars vivaient sur le territoire actuel chilien mais, du fait du voisinage, ils pouvaient se trouver dans un secteur frontalier de l'Argentine, entre le lac Fagnano et la cordillère des Andes fuégiennes. Ils n'établirent pas de campements permanents sur ces territoires, leur présence occasionnelle était due à des échanges avec les Onas, Tehuelches et Yamanas (avec ces derniers, quelques liens familiaux ont été créés). La bibliographie argentine inclut fréquemment les Alacalufs parmi les peuples originaires d'Argentine, même si leur présence n'a été que transitoire.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire