Grandes découvertes
Les Portugais commencent à explorer la côte atlantique de l'Afrique en 1418 sous l'impulsion du prince Henri. Ils atteignent l'océan Indien en 1488 en contournant le cap de Bonne-Espérance. En cherchant une nouvelle voie vers l'Asie, le navigateur italien Christophe Colomb — financé par la monarchie espagnole — traverse l'océan Atlantique et atteint en 1492 un « Nouveau Monde » : l'Amérique. Pour éviter un conflit entre l'Espagne et le Portugal, le traité de Tordesillas (1494) partage le monde en deux zones d'explorations où chacun des protagonistes aura l'exclusivité des droits sur ces découvertes. En 1498, une expédition portugaise menée par Vasco de Gama réalise finalement le rêve d'établir une liaison maritime avec l'Inde en navigant autour de l'Afrique. Peu après, ils atteignent les « îles aux épices » en 1512 et la Chine, un an plus tard. Les explorations vers l'ouest et vers l'est se superposent lorsque le Portugais Fernand de Magellan réalise la première circumnavigation de la Terre en 1522. Dans le même temps, les conquistadors espagnols explorent l'intérieur des terres américaines et détruisent les empires amérindiens. À partir du XVe siècle les Français, les Anglais et les Hollandais se lancent dans la course et contestent le monopole ibérique sur le commerce maritime. Ils participent à l'exploration des Amériques mais surtout à celle de l'Océanie. Parallèlement aux explorations maritimes, les Russes explorent et conquièrent la quasi-totalité de la Sibérie.
Au même titre que la Renaissance, l'« Âge des découvertes » constitue un pont entre Moyen Âge et Époque moderne. L'imprimerie (qui vient d'apparaître) contribue à répandre les récits d'exploration et les cartes de terres lointaines et alimente ainsi la montée de l'humanisme et du questionnement scientifique et intellectuel. L'expansion européenne mène à la mise en place des empires coloniaux : les contacts entre Ancien et Nouveaux Mondes produisent l'échange colombien qui désigne le transfert massif entre les hémisphères occidentaux et orientaux de plantes, d'animaux, de populations (dont les esclaves), de maladies infectieuses et de culture. Cette première mondialisation engendre des modifications écologiques, agricoles et culturelles parmi les plus importantes de l'histoire. L'exploration européenne continue jusqu'au XXe siècle, date à laquelle on estime que la totalité des terres émergées est cartographiée.
Sommaire
- 1 Contexte
- 2 Prélude (1241–1438)
- 3 L'océan Atlantique (1419–1507)
- 4 L'océan Indien (1497–1513)
- 5 L'océan Pacifique (1513–1529)
- 6 La conquête des empires amérindiens (1519–1532)
- 7 Nouvelles routes commerciales (1542–1565)
- 8 Implication de l'Europe du Nord (XVIe siècle)
- 9 Exploration russe de la Sibérie (1581-1660)
- 10 Impact global
- 11 Notes et références
- 12 Annexes
Contexte
Un monde encore peu connu
Au début du XVe, les Européens ont une très bonne idée de l'Europe et du bassin Méditerranéen, et quelques notions du reste de l'Afrique et de l'Asie, mais ces dernières restent confuses. Ils se doutent aussi que la Terre est ronde mais ne connaissent pas bien ses dimensions1. À la fin du XVIe siècle, les Hommes ont découvert l'Amérique de l'est et du centre, les littoraux de l'Amérique du Sud et de l'Afrique, ainsi qu'une grande partie de l'Asie (Russie, Empire Mongol).À la fin du siècle, il reste encore beaucoup de territoires inconnus comme l'Australie, le Centre de l'Afrique, mais la civilisation Européenne a une connaissance globale des continents du monde, les cartes sont beaucoup plus précises2.
De plus, de nombreuses avancées technologiques comme la Caravelle ou l'Astrolabe permettent aux Européens une navigation plus sûre et grandement améliorée.
La volonté de répandre la foi chrétienne et de découvrir de nouvelles voies maritimes vers les terres inconnues joua aussi en faveur des Grandes Découvertes.
Prélude (1241–1438)
Voyages médiévaux
Une série d'expéditions terrestres européennes à travers l'Eurasie à la fin du Moyen Âge constitue le prélude aux Grandes découvertes5. Les Mongols, après avoir envahi une grande partie de l'Asie et menacé l'Europe, unifient une bonne partie de l'Eurasie et la Pax Mongolica garantit l'existence de routes de commerces sûres entre le Moyen-Orient et la Chine6,7. Plusieurs européens en profitent pour explorer l'Orient: La plupart sont Italiens car le commerce entre l'Europe et le Moyen-Orient est contrôlé par les républiques maritimes comme Venise.Des ambassadeurs chrétiens sont envoyés jusqu'à Karakorum dans l'actuelle Mongolie. Parmi eux, on peut citer Jean de Plan Carpin, envoyé par le pape Innocent IV à la cour du Grand Khan de 1241 à 12476. Au même moment, Iaroslav II Vladimirski et ses fils André II Vladimirski et Alexandre Nevski se rendent à Karakorum mais ne laissent aucun récit détaillé. D'autres voyageurs comme le Français André de Longjumeau (en 1245 et 1249) et le Flamand Guillaume de Rubrouck traversent l'Asie centrale jusqu'en Chine8. Marco Polo relate dans le Devisement du monde, le récit détaillé de ses voyages en Asie entre 1271 et 1295 en tant qu'hôte de la dynastie Yuan de Kubilai Khan9.
En 1291, les deux frères marchands Vadino et Ugolino Vivaldi partent de Gênes avec deux galères pour explorer l'Atlantique mais disparaissent le long de la côte marocaine, ce qui alimente les craintes sur la navigation dans l'Atlantique10. De 1325 à 1354, un érudit marocain Ibn Battûta réalise un impressionnant voyage qui l’amène de Tombouctou au sud à Bulghar (en actuelle Russie, sur la Volga) au nord et de Tanger à l’ouest à Quanzhou en Extrême-Orient. Ses récits sont compilés par Ibn Juzayy en un livre appelé Rihla (voyage). À partir de 1357, un livre retraçant les voyages supposés de Jean de Mandeville, le Livre des merveilles du monde, connaît un important succès malgré ses descriptions souvent fantastiques et douteuses.
En 1400, une traduction latine de la Géographie de Ptolémée atteint l'Italie depuis Constantinople. La redécouverte des connaissances antiques permet aux cartographes de l'époque d'améliorer leur compréhension du monde. En 1439, Nicolò de' Conti publie un récit de ses voyages en Asie du Sud-Est et Athanase Nikitine fait de même pour l'Inde en 1472.
Ces périples terrestres ont peu d'effets immédiats. L'Empire mongol s'effondre presque aussi vite qu'il était apparu et la route vers l'est devient beaucoup plus dangereuse. La peste noire du XIVe siècle ralentit le commerce terrestre tout comme la montée en puissance de l'Empire ottoman et force les Européens à chercher de nouvelles routes commerciales.
Expéditions chinoises
Une large flotte de jonques est préparée pour ces voyages dont certaines mesurent plus de 60 mètres de longueur et des milliers de marins sont embarqués. Au moins sept expéditions sont lancées à partir de 1405, chacune étant plus ambitieuse que la précédente. Les flottes visitent l'Arabie, l'Afrique orientale, l'Inde, l'Insulinde et le Siam12. Zheng He offre des présents en or, en argent, en porcelaine et en soie et reçoit en échange des animaux exotiques comme des girafes, des autruches ou de l'ivoire13,14. Cependant, la mort de l'empereur en 1433 entraîne l'arrêt brutal de ces expéditions très coûteuses pour le pouvoir. La Chine entre dans une période d'isolationnisme connue sous le nom d'haijin.
L'océan Atlantique (1419–1507)
Article détaillé : Découvertes portugaises.
Les marins musulmans basés au Yémen et à Oman qui dominent les routes maritimes dans tout l'océan Indien, achetent les épices en Asie du Sud-Est et les transférent dans les riches villes marchandes de l'Inde comme Kozhikode (Calicut) puis jusque dans le golfe Persique et la mer Rouge. À partir de là, les épices sont transportées par terre jusqu'aux côtes méditerranéennes. Les marchands, principalement vénitiens, redistribuent ensuite ces produits dans toute l'Europe. Cependant, la montée en puissance de l'Empire ottoman et la chute de Constantinople en 1453 introduit une forte hausse des taxes qui prive les Européens d'importantes routes commerciales.
Les Européens sont donc contraints de trouver de nouvelles voies d'approvisionnement. D'autant plus qu'ils souffrent d'un déficit grandissant en or et en argent18 car les pièces utilisées pour acheter les épices et la soie affluent hors du continent pour l'Orient. La plupart des mines européennes s'épuisent ou deviennent inexploitables, compte tenu de la technologie disponible. Le manque de métaux précieux mène à la création d'un complexe système bancaire destiné à gérer les risques du commerce : la première banque véritable, l'Office de Saint Georges est fondée en 1407 à Gênes.
Pour leurs premières expéditions, les Européens utilisent la boussole. Cependant, les progrès de la cartographie et de l'astronomie entrainent l'apparition de l'astrolabe, du quadrant plus précis, et de la navigation astronomique. Les navigateurs restent à proximité des côtes et pratiquent le cabotage, guidés par des portulans, cartes qui indiquent les routes les plus sûres et les dangers de la navigation. Ainsi, les marins partent d'un point connu et se dirigent avec leur boussole, en s'aidant des indications des portulans pour trouver leur route 19.
Débuts de l'exploration portugaise (1400-1460)
Henri veut savoir jusqu'où s'étend la domination musulmane en Afrique pour pouvoir commercer par mer directement avec l'Afrique de l'Ouest25, il cherche également à trouver le légendaire royaume chrétien du prêtre Jean pour pouvoir prendre les musulmans à revers26 et une route maritime vers les Indes orientales pour participer au très profitable commerce des épices. Il crée un groupe de marchands, d'armateurs, de cartographes et d'investisseurs dans la forteresse de Sagres dans le but d'organiser des expéditions le long des côtes africaines jusqu'en Mauritanie. Il reçoit ainsi son surnom d'Henri le Navigateur. Madère est ainsi atteinte en 1419 et les Açores en 1427.
À cette époque, les cartes européennes s'arrêtent au cap Chaunar sur la côte africaine et personne ne sait s'il est possible de revenir de la mer des Ténèbres qui se trouve au-delà 27. Malgré les mythes avertissant de la présence de monstres marins, le cap est franchi en 1421 et en 1434, Gil Eanes dépasse le dangereux cap Bojador mettant fin aux vielles légendes.
L'introduction de la caravelle au milieu du XVe siècle représente une avancée majeure : elle est capable de remonter le vent mieux que n'importe quel autre navire de l'époque 28. Issues des bateaux de pêches, elles sont les premiers navires à pouvoir naviguer en haute-mer à distance des récifs côtiers. La diffusion des éphémérides permet la navigation astronomique et l'orientation en pleine mer sans repère terrestre. Ces tables révolutionnent la navigation en permettant de calculer la latitude. Le calcul de la longitude demeure cependant aléatoire 29,30. Ainsi, l'exploration peut continuer progressant d'environ un degré par an 31. L'actuel Sénégal et la presqu'île du Cap-Vert sont atteints en 1444 par Dinis Dias. Un an plus tard António Fernandes avance jusqu'à l'actuelle Sierra Leone.
La prise de Constantinople par les Ottomans en 1453 représente un choc pour la chrétienté et ralentit fortement le commerce avec l'Orient. En 1455, le pape Nicolas V rédige la bulle Romanus pontifex, qui renforce la précédente Dum Diversas de 1452, qui accordait toutes les terres découvertes au-delà du cap Bojador au roi Alphonse V de Portugal et à ses successeurs et autorisait l'asservissement des païens de ces régions 32. Le roi commande alors une carte à des experts génois pour trouver une route vers l'Asie. Ceux-ci livrent la carte de Fra Mauro, probablement inspirée de la carte Kangnido d'origine chinoise, à Lisbonne en 145933.
En 1456, Diogo Gomes atteint l'archipel du Cap-Vert. Dans la décennie qui suit, les capitaines vénitien Alvise Cadamosto et génois António Noli au service du roi Henri fondent la ville de Cidade Velha, première ville européenne sous les tropiques.
L'exploration portugaise après le prince Henri
Le prince Henri meurt en novembre 1460. Les faibles revenus issus des explorations font que le marchand Fernão Gomes reçoit en 1469 le monopole du commerce dans le golfe de Guinée en échange de quoi il est tenu d'explorer 100 miles par an durant cinq ans 34. Avec son soutien, les navigateurs João de Santarém, Pedro Escobar, Lopo Gonçalves, Fernando Póo et Pêro de Sintra vont plus loin que ce qui avait été convenu. Ils atteignent l'hémisphère Sud et les îles du golfe de Guinée dont Sao Tomé-et-Principe et explorent la côte de l'actuel Ghana en 1471. Dans l'hémisphère sud, les marins découvrent la Croix du sud comme point de référence pour la navigation astronomique.En 1481, le nouveau roi Jean II de Portugal décide d'implanter le comptoir d'Elmina au Ghana pour exploiter les alluvions chargées d'or. En 1482, le fleuve Congo est exploré par Diogo Cão35 qui en 1486 atteint le Cape Cross dans l'actuelle Namibie.
L'avancée suivante est capitale. En 1488, Bartolomeu Dias franchit la pointe sud de l'Afrique qu'il nomme le « cap des Tempêtes » (Cabo das Tormentas) et continue jusqu'à l'actuel Port Elizabeth prouvant que l'océan Indien est accessible par l'Atlantique. Simultanément Pêro da Covilhã est envoyé secrètement par terre jusqu'en Éthiopie où il acquiert des informations sur la mer Rouge et la côte orientale de l'Afrique laissant supposer que la route des Indes est ouverte36. Le Cap des tempêtes est rapidement renommé « cap de Bonne-Espérance » (Cabo da Boa Esperança) par le roi Jean II à cause de l'espoir suscité par la possibilité d'une route vers l'Inde.
Les « Indes occidentales » de Colomb
Articles détaillés : Découverte et exploration de l'Amérique et Colonisation européenne des Amériques.
Le 3 août 1492, Christophe Colomb quitte Palos de la Frontera avec trois navires, une caraque, la Santa Maria et deux caravelles, la La Pinta et la La Niña. Colomb fait d'abord escale aux Canaries où il se réapprovisionne et avance dans l'Atlantique dans ce qui sera nommé la mer des Sargasses.
Colomb et les autres explorateurs espagnols sont initialement déçus par leurs découvertes. À la différence de l'Asie et de l'Afrique, les habitants des Caraïbes ont peu de choses à échanger avec les navires espagnols. Il faudra attendre l'exploration du continent pour que les richesses attendues ne soient découvertes.
Traité de Tordesillas (1494)
Article détaillé : Traité de Tordesillas.
Un Nouveau Monde : l'Amérique
En 1499, João Fernandes Lavrador et Pêro de Barcelos, financés par le roi du Portugal, découvrent le Labrador. Au même moment, les frères Gaspar et Miguel Corte-Real explorent les côtes du Groenland et de Terre-Neuve44. Les deux explorations sont mentionnées sur le planisphère de Cantino de 1502.
Les « Vraies Indes » et le Brésil
Article détaillé : Découverte du Brésil.
En 1497, le nouveau roi Manuel Ier de Portugal envoie une flotte d'exploration vers l'Est menée par Vasco de Gama
pour achever le projet de ses prédécesseurs de trouver une route vers
l'Inde. En juillet 1499, ce dernier revient à Lisbonne avec un important
chargement d'épices et la nouvelle selon laquelle les Portugais ont
atteint l'Inde se répand rapidement en Europe45.
Alors que Colomb organise deux nouveaux voyages vers l'Amérique
centrale, une seconde expédition portugaise est assemblée pour partir en
Inde. La flotte de treize navires et 1 500 hommes quitte Lisbonne le 9 mars 1500. Le commandant est Pedro Álvares Cabral et il est accompagné par les marins Bartolomeu Dias, Nicolau Coelho et le notaire Pero Vaz de Caminha. Pour éviter les eaux sans vent du golfe de Guinée, la flotte s'oriente vers le sud-ouest. Le 21 avril, une montagne apparaît à l'horizon et est nommé Monte Pascoal ; Le 22 avril, la flotte accoste sur la côte du Brésil et trois jours plus tard, elle jette l'ancre dans une baie nommée Porto Seguro.
Cabral soupçonne que cette nouvelle terre se trouve à l'est du méridien
de Tordesillas et renvoie un navire vers le Portugal avec l'importante
nouvelle. Pensant avoir découvert une île, Cabral nomme cette terre Ilha de Vera Cruz
(île de la Vraie Croix). Certains historiens soutiennent que les
Portugais connaissaient l'existence du saillant sud-américain auparavant
d'où l'insistance du roi Jean II pour déplacer le méridien de
Tordesillas vers l'Ouest46.À l'invitation du roi Manuel Ier de Portugal, Amerigo Vespucci47, Florentin travaillant à Séville pour la banque des Medicis organise deux expéditions vers la Guyane avec Juan de la Cosa48. Voyages rendus célèbres par la publication entre 1502 et 1504 de trois lettres qui lui sont attribuées. Pour les Européens, ll devient de plus en plus clair que Colomb n'a pas atteint l'Asie mais plutôt un Nouveau Monde, l'Amérique ainsi nommée en 1507, à Saint-Dié-des-Vosges, par les cartographes lorrains Martin Waldseemüller et Mathias Ringmann. Probablement en référence à Amerigo Vespucci premier Européen à avoir suggéré que ces terres ne sont pas l'Asie mais bien un « Nouveau Monde » 49. Le Mundus novus, titre latin d'un document basé sur les lettres de Vespucci à Lorenzo di Pierfrancesco de Médicis connait un grand succès en Europe 50.
L'océan Indien (1497–1513)
La route de l'Inde
Sous l'impulsion du nouveau roi Manuel Ier de Portugal, une petite flotte d'exploration composée de quatre navires et de 170 hommes quitte le port de Lisbonne en juillet 1497 sous le commandement de Vasco de Gama. En décembre, la flottille dépasse le point où Dias avait fait demi-tour et entre dans des eaux inconnues. Le 20 mai 1498, ils arrivent à Calicut. Cependant Gama est handicapé par le manque de marchandises précieuses lui permettant d'acheter les produits rares qu'il convoite. Deux ans après leur départ, Gama et 55 hommes reviennent victorieusement au Portugal comme les premiers marins à avoir navigué directement d'Europe en Inde.
En 1500, une seconde flotte bien plus imposante de treize navires et 1 500 hommes est envoyée en Inde. Sous le commandement de Pedro Álvares Cabral, elle découvre la côte brésilienne puis dans l'océan Indien, un des navires atteint Madagascar (1501) qui sera partiellement explorée par Tristan da Cunha en 1507. L'île Maurice est découverte en 1507 et Socotra est occupée en 1506. La même année, Lourenço de Almeida débarque au Sri Lanka, l'île nommée « Taprobane » par les Grecs et les Romains. Les premiers comptoirs sont établis à Kochi et à Calicut en 1501 puis à Goa en 1510.
Les « îles aux épices » et la Chine
En 1511, Afonso de Albuquerque conquiert Malacca alors pivot du commerce en Asie et lance plusieurs missions diplomatiques à l'est : Duarte Fernandes est ainsi le premier Européen à être reçu à la cour du Royaume du Siam. Il découvre l'emplacement des fameuses « îles aux épices », les Moluques, alors seule zone de production de la muscade et du clou de girofle et y envoie une expédition menée par Antonio de Abreu où ils sont les premiers Européens en 151252. Les Portugais installent un comptoir fortifié sur l'île de Ternate, le fort de São João Baptista de Ternate marquant ainsi leur présence en Insulinde.En mai 1513, Jorge Álvares atteint la Chine : Il est le premier à accoster dans le delta de la rivière des Perles. Rafael Perestrelo, un cousin du célèbre Christophe Colomb est le premier à explorer la côte Sud de la Chine et à commercer à Guangzhou53,54. Fernão Pires de Andrade visite la ville en 1517 et y établit un comptoir commercial. En 1557, les Portugais reçoivent l'autorisation d'occuper Macao.
Pour renforcer le monopole sur le commerce dans l'océan Indien, Ormuz dans le golfe Persique est envahi par Afonso de Albuquerque en 1507 qui établit des relations diplomatiques avec la Perse. En 1513, en tentant de conquérir Aden, une expédition franchit le détroit de Bab-el-Mandeb et pénètre en mer Rouge. En 1521, une force menée par António Correia envahit Bahreïn annonçant une domination portugaise de 80 ans sur le golfe Persique55. En mer Rouge, Massaoua est le point le plus septentrional atteint par les Portugais jusqu'en 1541, lorsqu'une flotte atteint Suez.
L'océan Pacifique (1513–1529)
Dans le même temps, les Portugais présents en Asie du Sud-Est font les premières descriptions du Pacifique occidental en dépassant Bornéo et en atteignant Luçon dans les Philippines actuelles57.
Le roi d'Espagne et Christopher de Haro financent l'expédition de Magellan. Celle-ci est composée de cinq navires : le navire amiral et caravelle Trinidad et quatre caraques le San Antonio, le Concepcion, le Santiago et le Victoria ainsi que de 237 hommes de différentes nationalités. La flotte quitte Séville le 10 août 1519 avec l'objectif de rallier les Moluques en naviguant vers l'ouest pour les incorporer dans la zone d'influence espagnole60.
Cette circumnavigation apporte à l'Espagne une connaissance précieuse du monde et de ses océans qui conduit à son installation aux Philippines. Bien qu'il ne s'agit pas d'une alternative réaliste à la route portugaise autour de l'Afrique 62 (Le détroit de Magellan est trop éloigné et la traversée du Pacifique est trop longue depuis l'Espagne), plusieurs expéditions espagnoles utilisent cette voie pour naviguer depuis la côte mexicaine jusqu'aux Philippines.
L'Est et l'Ouest se rencontrent
Comme aucun accord ne prévoyait de limite orientale à la séparation de Tordesillas, les deux royaumes se concertent pour régler le problème. De 1524 à 1529, les experts Portugais et Espagnols se rassemblent à Elvas-Bajadoz sur la frontière entre les deux pays pour déterminer la position exacte de l'antiméridien prolongeant celui de Tordesillas qui divise le monde en deux hémisphères de taille égale. Malgré le talent des scientifiques, les connaissances de l'époque sont insuffisantes pour donner une estimation exacte de la longitude et chaque groupe revendique la souveraineté des îles. Le problème est finalement réglé en 1529 après une longue négociation par le traité de Saragosse qui attribue les Moluques au Portugal et les Philippines à l'Espagne 67. Des calculs ultérieurs montreront que les deux archipels se trouvent en fait en territoire portugais.
Entre 1525 et 1528, le Portugal envoie plusieurs expéditions dans les Moluques. Gomes de Sequeira et Diogo da Rocha sont envoyés au nord par le gouverneur de Ternate, Jorge de Meneses et sont les premiers Européens à atteindre les Îles Carolines qu'ils nomment « îles de Sequeira »68. En 1526, Meneses accoste sur l'île de Waigeo en Nouvelle-Guinée. À partir de là, des historiens menés par l'Australien Kenneth McIntyre proposent une théorie selon laquelle les Portugais et en particulier Cristóvão de Mendonça seraient les premiers Européens à avoir atteint l'Australie.
En 1527, l'Espagnol Hernán Cortés organise une flotte pour découvrir de nouvelles terres dans la « mer du Sud » (l'océan Pacifique) et demande à son cousin Alvaro de Saavedra de la commander. Le 31 octobre 1527, Saavedra quitte la Nouvelle-Espagne (Mexique) et arrive en Nouvelle-Guinée. Un des navires atteint les Moluques en octobre 1528. Dans une tentative pour rejoindre la Nouvelle-Espagne, il est repoussé par les alizés venant du Nord-Est. Dans une nouvelle tentative, il découvre les îles de l'Amirauté et les îles Marshall mais ne parvient toujours pas à aller contre les alizés. La route entre les Philippines et le Mexique fut finalement découverte en 1565 par Andrés de Urdaneta69.
La conquête des empires amérindiens (1519–1532)
Des rumeurs d'îles inconnues au nord-ouest d'Hispaniola arrivent en Espagne et convainquent le roi Ferdinand II d'Aragon d'organiser de nouvelles explorations dans la zone. Tandis que les Portugais réalisent d'énormes bénéfices dans l'océan Indien, les Espagnols entreprennent d'explorer l'intérieur des terres pour découvrir de l'or et des ressources précieuses. Les membres de ces expéditions, les Conquistadores sont généralement des nobles peu fortunés d'Espagne, individualistes, mercenaires dans l'âme qui entendent s'enrichir dans les « Indes » alors qu'ils n'y parvenaient en Europe. Ils s'équipent à leurs propres frais en échange d'une part des profits. Leur organisation ressemble plus à celle d'une milice qu'à celle d'une véritable armée professionnelle70.Dans les Amériques, les Espagnols découvrent de puissants empires aussi vastes et peuplés que ceux d'Europe. La capitale de l'Empire aztèque, Tenochtitlan compte plus de 200 000 habitants. Pourtant, avec des troupes bien inférieures en nombre à celles des empires auxquels ils s'attaquent, les conquistadores parviennent à soumettre et à éliminer les plus puissants souverains, aidés par une supériorité technologique certaine, une détermination sans faille, des circonstances politiques exceptionnellement favorables et par la propagation de nombreuses maladies apportées par les Européens, qui déciment les habitants du Nouveau Monde pour qui elles sont complètement nouvelles (variole, grippe, typhus…). Une fois sa souveraineté établie, l'Espagne peut se concentrer sur l'extraction et l'exportation de l'or et de l'argent.
En 1512, pour récompenser Juan Ponce de León d'avoir exploré Porto Rico en 1508, le roi Ferdinand II lui demande de chercher de nouvelles terres dont il pourrait devenir le gouverneur 71. Avec trois navires et 200 hommes, León quitte Porto Rico en mars 1513 et arrive en Floride en avril. Il poursuit son voyage vers le nord et rencontre un puissant courant qui le ramene en arrière : Première rencontre avec le Gulf Stream qui devient la principale route maritime de l'Amérique centrale vers l'Europe 72.
Cortés et la Mésoamérique
Article détaillé : Conquête de l'Empire aztèque.
En juillet, il fonde Veracruz sur la côte mexicaine qui deviendra le principal port sur l'Atlantique de la Nouvelle-Espagne. Cortés demande à plusieurs reprises à rencontrer l'empereur Aztèque Moctezuma II qui refuse à chaque fois. En octobre, Cortés marche vers la capitale Tenochtitlan et noue des alliances avec les tribus locales mécontentes de la domination aztèque. Soutenu par 3 000 Tlaxcaltèques, il entre dans Cholula, la deuxième plus grande ville de l'Empire. Soupçonnant une possible traîtrise des Aztèques, Cortès lance une attaque préventive et massacre plusieurs dizaines de milliers de personnes avant d'incendier la cité.
Dans le même temps, Velázquez lance une nouvelle expédition menée par Pánfilo de Narváez pour punir Cortés73. Ce dernier laisse 200 hommes à Tenochtitlan et quitte la ville avec le reste de son armée pour affronter Narváez. Il sort victorieux de la bataille et convainc les vaincus de se joindre à lui. Cependant, craignant une révolte, l'un des lieutenants de Cortés à Tenochtitlan profite d'une fête aztèque pour massacrer l'aristocratie ce qui déclenche un soulèvement de la population. Cortès revient rapidement dans la ville et tente d'obtenir le soutien de Moctezuma II mais l'empereur est mort, probablement tué par ses sujets en colère contre sa trahison75. Lors de la Noche Triste, les Espagnols parviennent à quitter la ville au prix de lourdes pertes73. Après leur victoire inespérée lors de la bataille d'Otumba, les Espagnols arrivent à Tlaxcala73. Profitant du soutien indéfectible des Tlaxcaltèques, Cortès peut repartir à l'assaut de Tenochtitlan qui tombe le 13 août 1521. Le dernier empereur Cuauhtémoc est capturé, torturé et exécuté en février 1525 mettant fin à l'Empire aztèque. La ville de Tenochtitlan devint Mexico, la capitale de la Vice-Royauté de Nouvelle-Espagne.
Pizarro et l'Empire inca
Article détaillé : Conquête de l'Empire inca.
Francisco Pizarro avait accompagné Balboa dans sa traversée de l'isthme de Panama. En 1524, il forme un partenariat avec le prêtre Hernando de Luque et le soldat Diego de Almagro pour explorer le sud, s'accordant pour partager les profits. En septembre 1524, la première des trois expéditions part pour conquérir le Pérou avec 80 hommes et 40 chevaux. C'est un désastre: Pizarro ne dépasse même pas la Colombie et doit reculer à cause du mauvais temps, de la faim et de l'hostilité des indigènes. Les noms de lieux le long de leur route, Puerto deseado (port désiré), Puerto del hambre (port de la faim) and Puerto quemado (port brulé) témoignent de leurs difficultés. Deux ans plus tard, une nouvelle expédition est organisée malgré le manque d'enthousiasme du gouverneur du Panama. En août 1526, les 160 hommes et deux navires atteignent le Río San Juan puis se séparent, Pizarro reste sur place pour explorer les marécages de la côte et Almagro est envoyé en arrière pour chercher des renforts. Ayant dépassé l'Équateur, l'un des navires de Pizarre capture un radeau de la Région de Tumbes. Celui-ci transporte des tissus, de la céramique mais surtout de l'or, de l'argent et des émeraudes. Après l'arrivée des renforts, la progression continue et ils atteignent Atacames où vit une importante population sous contrôle inca mais celle-ci semble si dangereuse que les Espagnols rebroussent chemin.
Au printemps 1528, Pizarre retourne en Espagne où il rencontre l'empereur Charles Quint. Ce dernier écoute son récit et promet de le soutenir. La Capitulación de Toledo76 autorise Pizarro à conquérir le Pérou. Celui-ci convainc ses frères Hernando Pizarro, Juan Pizarro et Gonzalo Pizarro de le suivre ainsi que Francisco de Orellana qui explorera par la suite l'Amazone. La troisième et dernière expédition quitte Panama le 27 décembre 1530. Avec trois navires et 180 hommes, elle accoste au Pérou et découvre un Empire Inca déchiré par la guerre civile. Deux frères Huascar et Atahualpa s'affrontent pour accéder au trône. Pizarro propose à ce dernier de l'aider dans sa lutte contre son frère et une rencontre est organisée à Cajamarca. Malgré une supériorité numérique écrasante (7 000 Incas contre 200 Espagnols), Atahualpa est capturé. Apprenant que Huascar avait été capturé par ses armées et craignant que les Espagnols ne le libèrent, il fait exécuter son frère et devient ainsi le nouvel empereur inca. Pour obtenir sa libération, Atahualpa fait livrer plusieurs tonnes d'or et d'argent aux Espagnols. Voyant le pouvoir et la puissance du souverain, les Espagnols décident de l'exécuter le 29 août 1533 dans sa cellule.
En 1534, Pizarro envahit Cuzco et fonde la ville de Lima sur la côte péruvienne en janvier 1535. La conquête du pays ne fut achevée qu'en 1572 avec l'exécution du dernier Sapa Inca, Túpac Amaru.
Nouvelles routes commerciales (1542–1565)
Il suppose que les alizés du Pacifique font une gyre de la même manière que ceux de l'Atlantique. Il parvient ainsi à revenir jusqu'au cap Mendocino en Californie puis il longe la côte jusqu'au port d'Acapulco. Une route maritime est ainsi ouverte entre les Philippines et le Mexique : Une fois par an, le galion de Manille, en réalité une flotte de plusieurs navires, fait l'aller-retour entre Acapulco et Manille pour amener les marchandises qui sont ensuite rapatriées en Europe à travers l'Atlantique.
Implication de l'Europe du Nord (XVIe siècle)
En 1568, les Hollandais se soulèvent contre Philippe II d'Espagne menant à la guerre de Quatre-Vingts Ans. La guerre entre l'Espagne et l'Angleterre éclate également. En 1580, Philippe II devient roi du Portugal et l'union ibérique ainsi créée devient l'État le plus puissant d'Europe. Les troupes de Philippe envahissent les importantes cités commerciales de Bruges et de Gand. Anvers, alors le port le plus important du monde tombe en 1585. La population protestante reçut l'ordre de quitter la ville78 et la plupart émigra à Amsterdam. Celle-ci était composée d'artisans expérimentés, de riches marchands et de réfugiés fuyant les persécutions religieuses comme les juifs séfarades chassés d'Espagne et du Portugal puis plus tard les huguenots français. Les Pères pèlerins passèrent également du temps dans la ville avant de partir pour le Nouveau Monde. Cette intense immigration fut l'un des facteurs de l'expansion de la ville, d'un petit port en 1585, Amsterdam devint rapidement l'un des pôles financier et économique les plus importants au monde. Après la destruction de l'Invincible Armada en 1588, le commerce maritime connut une expansion fulgurante.
L'émergence de la puissance maritime hollandaise fut rapide et remarquable. Durant des années, les marins hollandais avaient participé aux voyages portugais vers l'est en tant que matelots et cartographes. En 1592, Cornelis de Houtman fut envoyé par des marchands hollandais de Lisbonne pour collecter le plus d'informations possibles sur les Moluques. En 1595, le marchand et explorateur Jan Huygen van Linschoten, qui avait navigué avec les Portugais dans l'océan Indien, publia un carnet de voyage à Amsterdam sous le titre de Reys-gheschrift vande navigatien der Portugaloysers in Orienten ("Rapport de voyage sur la navigation portugaise dans l'Orient")79. Cet ouvrage incluait les routes maritimes permettant de naviguer entre le Portugal et les Indes Orientales. La même année, Houtman suivit ces indications pour réaliser le premier voyage d'exploration hollandais qui découvrit une nouvelle voie maritime traversant l'océan Indien directement depuis Madagascar jusqu'au détroit de la Sonde en Indonésie où il signa un traité avec le sultan de Banten.
Les premières compagnies à charte sont créées comme les Compagnies néerlandaise et anglaise des Indes orientales et la France, l'Angleterre et les Provinces-Unies commencent à s'attaquer au monopole portugais dans l'océan Indien80.
Exploration de l'Amérique du Nord
En 1524, Giovanni da Verrazzano, un Italien naviguant au service du roi François Ier de France, motivé par l'« insolence » de la division du monde entre les Portugais et les Espagnols, est le premier Européen à visiter la côte atlantique des actuels États-Unis, remontant la côte depuis la Caroline du Sud jusqu'en Nouvelle-Écosse. La même année, Estevão Gomes, un cartographe portugais qui avait navigué avec Magellan explore la Nouvelle-Écosse puis la côte du Maine jusqu'à l'estuaire de l'Hudson qui deviendra New York avant d'arriver en Floride en août 1525. En conséquence de cette expédition, la carte du monde de Diego Ribero de 1529 reproduit de manière presque parfaite la côte Est de l'Amérique du Nord. De 1534 à 1536, l'explorateur français Jacques Cartier, qui avait peut-être participé aux missions de Verrazzano en Nouvelle-Écosse et au Brésil est le premier Européen à voyager à l'intérieur de l'Amérique du Nord en remontant le fleuve Saint-Laurent qu'il nomme « pays de Canada » d'après un nom iroquoien. Il revendique la région de l'actuel Québec au nom du roi de France François Ier82,83.
Entre 1609 et 1611, Henry Hudson, après une série de voyages pour le compte de marchands anglais pour découvrir un passage du Nord-Est vers l'Inde, explore la région autour de l'actuelle ville de New York. Il remonte l'Hudson et pose les bases de la colonisation hollandaise de la région. La dernière expédition de Hudson le mène très au nord à la recherche du passage du Nord-Ouest menant à la découverte du détroit et de la baie d'Hudson. Après avoir passé l'hiver dans la baie James, Hudson tente de reprendre sa route vers le nord au printemps 1611 mais son équipage se mutine et Hudson est abandonné sur une chaloupe.
Quête de la route du nord
En 1553, les explorateurs anglais Hugh Willoughby et Richard Chancellor sont envoyés avec trois navires à la recherche du passage par la Company of Merchant Adventurers to New Lands. Durant le voyage à travers la mer de Norvège, les navires sont séparés par une tempête et Willoughby doit s'arrêter dans une baie près de l'actuelle frontière entre la Finlande et la Russie. Tout l'équipage dont Willoughby meurt de froid et le navire et le journal de bord sont retrouvés l'année suivante par un pêcheur russe. Richard Chancellor parvient à jeter l'ancre dans la mer Blanche et à se frayer un chemin jusqu'à Moscou et la cour du roi Ivan IV de Russie. Le pays s'ouvre au commerce et la Company of Merchant Adventurers devient la Compagnie de Moscovie.
L'exploration de Barentsz
Le 5 juin 1594, le cartographe Willem Barentsz quitte Texel aux Pays-Bas avec trois navires en direction de la mer de Kara avec l'espoir de trouver le passage du Nord-Est au-delà de la Sibérie87. Sur l'île Williams, l'équipage rencontre pour la première fois un ours blanc et il parvient à le capturer pour le ramener en Hollande mais l'animal saccage le navire et doit être tué. Barentsz atteint la côte occidentale de la Nouvelle-Zemble et remonte l'île jusqu'à être bloqué par des icebergs. L'année suivante, Maurice de Nassau le met à la tête d'une nouvelle expédition de six navires chargé de marchandises destinées à être vendues en Chine88. La flotte rencontre le peuple des Samis mais doit faire demi-tour car le détroit de Kara est gelé.En 1608, Henry Hudson fait une nouvelle tentative en tentant de dépasser le sommet de la Russie mais doit faire demi-tour après la Nouvelle-Zemble.
Australie et Nouvelle-Zélande
L'Espagnol Juan Fernández naviguant depuis le Chili en 1576 prétend avoir découvert le continent austral (probablement la Nouvelle-Zélande)90 mais meurt avant d'avoir pu pousser plus avant ses recherches. Luis Váez de Torrès, un marin de Galice naviguant pour la couronne d'Espagne prouve l'existence d'un passage au sud de la Nouvelle-Guinée qui porte aujourd'hui son nom : le détroit de Torrès. Pedro Fernandes de Queirós, un Portugais naviguant pour l'Espagne aperçoit une grande île au sud de la Nouvelle-Guinée en 1606 qu'il nomme Australie et qu'il présente au roi d'Espagne comme la Terra Australis incognita.
En 1642-1644, Abel Tasman, un explorateur et marchand hollandais au service de la VOC fait le tour de la Nouvelle-Hollande prouvant que l'Australie n'est pas une partie du mythique continent austral. Il est le premier Européen à atteindre la Tasmanie et la Nouvelle-Zélande puis les îles Fidji en 1643. Tasman, son navigateur Visscher et le marchand Gilsemans cartographient d'importantes zones de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande et des îles du Pacifique.
Exploration russe de la Sibérie (1581-1660)
Conquête du Khanat de Sibir
Au début du XVIIe siècle, l'expansion russe vers la Sibérie est ralentie par des problèmes internes liés à la période des troubles. Cependant, l'exploration et la colonisation des immenses territoires sibériens reprend menée par les cosaques à la recherche de précieuses fourrures et d'ivoire. Tandis que les cosaques viennent du sud de l'Oural, une autre vague de Russes provient de l'océan Arctique. Il s'agit des Pomors issus de la Région du Nord qui commercent déjà avec la ville de Mangazeïa depuis longtemps. En 1607, le village de Touroukhansk est fondé sur l'Ienisseï près de l'embouchure de la Toungouska inférieure et en 1619, la forteresse de Ienisseïsk est construite au confluent de l'Ienisseï et de l'Angara.
Entre 1620 et 1624, un groupe de trappeurs mené par Demid Pyanda quitte Touroukhansk et remonte la Toungouska inférieure sur 2 300 km, hivernant près de la Viliouï et de la Léna. Il est le premier russe à rencontrer les Iakoutes et les Bouriates et explore la région de Sakha. Il montre que l'Angara et la Toungouska supérieure forment une seule et même rivière.
En 1627, Piotr Beketov est nommé voïvode de l'Ienisseï et il réalise avec succès un voyage destiné à collecter les impôts des Bouriates de Transbaïkalie. Il est alors le premier russe à pénétrer en Bouriatie et il y fonde le premier village russe, Rybinsky. Beketov est ensuite envoyé explorer la Léna en 1631 et fonde Iakoutsk l'année suivante. Ses cosaques remontent l'Aldan pour construire des forteresses et collecter les impôts92.
Iakoutsk devient rapidement le point de départ principal des expéditions russes vers l'est, le sud et le nord. Maksim Perfilyev, qui avait été l'un des fondateurs de Ienisseïsk, fonde Bratsk le long de l'Angara en 1631 et en 1638, il est le premier russe à entrer en Transbaikalie en venant de Iakoutsk93,94. En 1643, Kurbat Ivanov mène un groupe de cosaques depuis Iakoutsk vers le sud des Monts Baïkal, découvre le lac Baïkal et visite l'île d'Olkhon. Par la suite, Ivanov fit la première carte et la première description du lac95.
Les Russes atteignent le Pacifique
En 1639, un groupe d'explorateurs mené par Ivan Moskvitine deviennent les premiers Russes à atteindre l'océan Pacifique et découvrent la mer d'Okhotsk. Les cosaques apprennent des populations locales que le large fleuve Amour coule bien plus au sud. En 1640, ils arrivent à l'embouchure du fleuve et découvrent probablement les îles Chantar sur le chemin vers le sud. Basé sur le rapport de Moskvitine, Kurbat Ivanov réalise la première carte de l'Extrême-Orient russe en 1642.En 1643, Vassili Poïarkov franchit les Monts Stanovoï et atteint la rivière Zeïa dans le pays des Daur qui payent un tribut à la dynastie chinoise des Qing. Après l'hiver, Poïarkov atteint le fleuve Amour qu'il descend jusqu'à l'embouchure. Comme ses cosaques s'étaient attirés l'hostilité des populations locales, Poïarkov décide de prendre une autre route pour le retour et construit des bateaux qui lui permettent de remonter le long des côtes de la mer d'Okhotsk avant de revenir finalement à Iakoutsk en 1646.
En 1649, Ierofeï Khabarov explore le bassin de l'Amour et revient avec une plus grande expédition en 1652. Cette fois, il rencontre une opposition armée de la part des Mandchous. Il passe l'hiver à Albazin puis descend l'Amour et fonde Achansk à proximité de l'actuel Khabarovsk. Il affronte les armées daouriennes, mandchoues, chinoises et même coréennes97. Par la suite, les Russes contrôlèrent la région de l'Amour jusqu'en 1689 lorsque le traité de Nertchinsk attribua ce territoire à la Dynastie Qing (la Russie récupérera cette zone lors du traité d'Aigun en 1858).
Au début des années 1660, Kurbat Ivanov retourne explorer la péninsule tchouktche et rédige la première carte du détroit de Béring où apparait l'île Wrangel, les îles Diomède et l'Alaska encore inconnus à l'époque en se basant sur les informations collectées chez les Tchouktches.
Ainsi, au milieu du XVIIe siècle, les Russes avaient exploré la quasi-totalité de la Sibérie à l'exception de l'Est de la péninsule de Kamtchatka et de certaines régions au-delà du cercle Arctique. La conquête du Kamtchatka fut terminée au début des années 1700 par Vladimir Atlassov tandis que l'exploration de l'Alaska et de la côte arctique sera finalisée par la grande expédition du Nord menée par Vitus Béring qui mit fin au rêve du passage du Nord-Est entre 1733 et 1743.
Impact global
Les nouveaux liens transocéaniques et leur domination par les Européens menent à l'impérialisme. Ces derniers finissent par dominer la plus grande partie de la planète. Les appétits européens pour le commerce, les marchandises précieuses et cette domination affectent dramatiquement les autres régions du monde. L'Espagne mene une politique de destruction violente des empires amérindiens pour substituer son pouvoir aux leurs. Les autres nations suivent la même voie et anéantissent de nombreuses cultures à travers le monde en supprimant les rituels païens, en imposant le christianisme, de nouvelles langues et de nouvelles organisations culturelles et sociales. Dans de nombreuses régions comme l'Amérique du Nord, l'Australie, la Nouvelle-Zélande ou l'Argentine, les populations autochtones sont brutalisées et chassées de leurs terres avant d'être réduites au statut de minorités dépendantes.
Les peuples amérindiens sont probablement ceux qui ont le plus souffert de l'expansion européenne car l'on estime qu'entre 50 et 90 % de leur population est décimée par les maladies importées par les Européens. Avant même leur première rencontre avec les Européens, certains peuples avaient déjà été anéantis 99.
Au cours du XVIe siècle, l'économie chinoise sous la dynastie Ming est stimulée par le commerce avec les Portugais, les Espagnols et les Hollandais. La Chine est impliquée dans le nouveau commerce mondial de marchandises, de plantes et d'animaux connu sous le nom d'échange colombien. Le commerce avec l'Europe apporte des quantités importantes de capitaux. Cependant, le pays ne parvient pas à développer une économie capitaliste sur le modèle européen permettant l'apparition d'une bourgeoisie composée de marchands capable d'organiser le commerce maritime international et la colonisation des nouveaux territoires. La baisse des revenus commerciaux, les effets du petit âge glaciaire sur l'agriculture, les épidémies, la menace des nomades mongols et le soulèvement de Li Zicheng entraînent le long déclin de la Chine qui se poursuivra jusqu'au XXe siècle.
Le jésuite italien Matteo Ricci (1552-1610) est le premier Européen à pouvoir visiter la Cité interdite de Beijing où il traduit les textes chinois en latin et inversement. Il travaille en étroite collaboration avec le mathématicien Xu Guangqi (1562-1633).
L'arrivée des Portugais au Japon en 1543 marque le début de l'époque du commerce Nanban au cours de laquelle les Japonais adoptent de nombreuses technologies et pratiques culturelles occidentales comme l'arquebuse, des armures et les navires de style européen, le christianisme et les arts décoratifs. Après que la Chine a interdit le commerce direct entre les marchands Chinois et le Japon, les Portugais servent d'intermédiaire entre les deux pays. Ils achètent la soie chinoise et l'échangent contre l'argent japonais 104. Cependant, après l'établissement d'une base commerciale espagnole à Manille, l'argent produit en Amérique remplace celui produit au Japon dans les achats chinois 105.
Impact économique en Europe
Le cœur économique de l'Europe se déplace de la Méditerranée vers l'Atlantique. La ville d'Anvers du Duché de Brabant devient le centre du commerce international106 et la ville la plus riche de l'époque107. Centré sur Anvers puis sur Amsterdam, le siècle d'or néerlandais repose fortement sur les Grandes découvertes. Francesco Guicciardini, un émissaire vénitien note que des centaines de navires transitent par Anvers chaque jour et que 2 000 chariots entrent dans la ville chaque semaine. Les navires portugais chargés de poivre et de cannelle déchargent leurs cargaisons dans le port et celles-ci sont distribuées dans tout le continent. L'administration est contrôlée par une oligarchie de marchands venant de toute l'Europe. La politique de tolérance en vigueur dans les Provinces-Unies attire de nombreux bourgeois juifs ou protestants persécutés dans leur pays.
L'accroissement de la richesse de l'Espagne coïncide avec un cycle de forte inflation en Europe. L'Espagne rapatrie des quantités colossales d'or et d'argent. La mine de Potosí en Bolivie produit à elle seule 240 tonnes d'argent par an entre 1560 et 1580111. Au cours du XVIe siècle, l'Espagne devient l'État le plus puissant d'Europe. Un voyageur français écrit en 1603 « En Espagne, tout est cher sauf l'argent »112. En inondant une Europe autrefois pauvre, cet argent provoque une importante inflation 113 aggravée par la stagnation de la population, les faibles salaires et la hausse du coût de la vie. Cet afflux n'enrichit cependant pas l'Espagne qui importe presque tous ses biens de l'étranger et devient de plus en plus dépendante des revenus fournis par son empire. Les nombreuses guerres ruinent le pays qui fait plusieurs fois défaut à la fin du XVIe siècle114. La perte du contrôle sur les Pays-Bas ruine davantage le royaume qui reste à la marge de l'essor européen.
Certes, l'essor du capitalisme et l'apparition d'une classe moyenne de bourgeois joue un rôle moteur dans le développement de la colonisation des terres nouvellement découvertes grâce aux compagnies commerciales. Mais, finalement, ce sont les nations du Nord de l'Europe comme la France ou l'Angleterre qui, malgré leur retard initial, vont le plus profiter de ces Grandes découvertes. À ce point démarre - pour 400 ans - une ère de domination européenne sur le monde.
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